La fin de l'errance dans les couloirs

C'était la première fois que Kamoku mettait les pieds dans une bibliothèque. Non pas qu'elle faisait partie de ces cancres qui fuient les bibliothèques comme la peste, non. Elle avait toujours eu peur des gens qui s'y trouvaient. Trop de gens, trop de chuchotements. Cependant Kamoku aimait lire. Sa mère possédait une collection de livres assez importante et elle avait souvent plongé son nez dans de longs romans. Quand elle lisait, Kamoku oubliait tout. Elle n'avait plus envie de se laver les mains, car elle n'était plus elle-même. Elle était le personnage du livre. On comprendra aisément qu'elle évitait les livres d'horreur...

Elle avait erré dans les couloirs un moment, et même dans la cour, avant de finalement aterrir dans le bâtiment principal, puis dans cette bibliothèque. Elle n'avait rien de phénoménal, mais elle contenait pas mal d'ouvrages, et des fauteuils. C'était déjà ça. Kamoku se sentait bien ici. Il faisait chaud (pas comme dehors...) et l'éclairage était plutôt léger. On s'y sentait un peu comme dans un petit nid douillet. Le rangement des livres, par contre, laissait un peu à désirer.

*Ils auraient bien besoin d'une bibliothécaire compétente...*

Malgré cela, Kamoku était conquise. Peut-être cette ambiance n'était-elle due qu'au fait qu'il était tard, et qu'en journée les PC étaient tous occupés, mais pour l'instant ce lieu silencieux avait l'effet sur Kamoku d'un petit coin de paradis. Après le poste de police, le hall glacial de Yonnin, le dortoir vide et la cantine où ses nerfs s'étaient envolés...

*Je me demande ce que devient ma mère. Peut-être qu'au final elle est soulagée de mon départ...*

Elle chassa rapidement cette idée de sa tête. Ce n'était pas le moment de broyer du noir. Elle flâna parmis les étagères. Puis attrapa finalement un livre au hasard et s'installa dans un fauteuil au fond de la salle. K.A. Applegate - EVERWORLD - A la recherche de Senna Elle lut les premières lignes de la quatrième de couverture.

Il existe un monde que personne ne connaît, que personne n'imagine.
Bienvenue à EverWorld, le pays d'où l'on ne revient pas...

*Et moi, reviendrais-je un jour de Yonnin ?*

Il y avait quelque chose. Elle se sentait inexpliquablement attirée par ce livre. Alors elle l'ouvrit à une page au hazard.

J'avais fini de me laver les mains. J'ai fermé le robinet,
reposé le savon, et j'ai essayé de sortir. Je me suis répété
que je pouvais sortir de la salle de bains. Bien sûr que je le
pouvais. Je me suis relavé les mains.
[...]
De nouveau j'ai fermé le robinet. J'ai reposé le savon.
J'ai essayé de sortir. Je m'étais déjà lavé les mains à cinq
reprises. Quatre de trop. Je n'étais pas fou, je savais bien
que c'était inutile, absurder, ridicule et, pire que tout,
complètement irrationel.Mais c'était sept, le nombre juste.
Sept. Pas cinq. Sept, c'était bon. Il fallait que ce soit sept.
Aucune raison particulière, pourquoi d'ailleurs se poser la
question ? Il ne pouvait exister un raison valable à cela.
Dans une journée, les gens se lavent les mains une fois,
deux, trois au maximum. Ils ont leur vie, une vie normale,
ils ne meurent pas, uns ne sont pas dévorés vifs par les
bactéries. C'était inutile de résister. J'en étais déjà à cinq.
Deux de plus et je serai libre, pour l'instant du moins.
Sept. C'était le nombre.

"Non, tu te trompes. Quatre. C'est quatre, le nombre."

Elle avait compris. C'était elle. Il était comme elle. Il fallait le lire. Peut-être y apprendrait-elle quelque chose, quelque chose qui justifierait son acte ? Qui justifierait son crime...?

Chapitre 1

La bagarre a commencé au Taco Bell, un snack où
déjeunent beaucoup d'élèves de terminale et
quelques premières, dont je fais partie. J'ai du mal
à trouver ma place ici, comme partout d'ailleurs.

Les étagères dansèrent, lumières vacillèrent. Puis ses paupières s'alourdirent.

"Trouver ma place, hein ? Moi aussi j'ai du mal...... moi aussi......."



[Ce livre existe réelement, c'est une trilogie. Pour ceux qui ça intéresse, n'hésitez pas, c'est une merveille.]